Aller au-delà de leurs capacités

Coincés entre les véhicules légers et lourds, les camions de poids moyen sont souvent poussés au-delà de leurs limites.
Les camions de poids moyen sont souvent sollicités au-delà de leurs capacités initiales, ce qui entraîne une usure accrue que les gestionnaires de parc doivent surveiller de près.
Tout comme l’enfant du milieu souvent incompris, les camions de poids moyen se retrouvent entre leurs homologues légers et lourds — et selon Brian Hickok, conseiller stratégique en gestion de parc chez Element Fleet Management, ce n’est pas toujours une bonne chose.
« Les véhicules de poids moyen se situent entre ces deux grandes catégories », explique-t-il, « donc ils sont souvent très sollicités dans certaines opérations, car les entreprises ou les parcs peuvent les utiliser pour plusieurs tâches. »
Selon leur usage, ces camions peuvent souffrir de divers problèmes d’usure. Prenons les deux exemples d’Hickok. Un camion fourgon de poids moyen utilisé chaque jour pour des livraisons en ville, dans un trafic dense ponctué d’arrêts fréquents, nécessitera un entretien plus soutenu des freins. Son moteur subira aussi une usure accrue à cause des accélérations et décélérations répétées. À l’inverse, un camion de service de poids moyen qui roule surtout en milieu rural, sur de longues distances avec une remorque lourde, et qui doit parfois quitter la route pour accéder à des chantiers, présentera plus souvent des problèmes de transmission.
De manière générale, il affirme que les camions de poids moyen sont surtout sujets à l’usure prématurée des éléments suivants (par ordre de fréquence décroissante) : la transmission, le système électrique, la chaîne cinématique, le moteur, les freins, la climatisation, la suspension et les pneus.
Bien entendu, tout dépend de leur utilisation. Les problèmes de freins, par exemple, sont fréquents pour les véhicules en milieu urbain ou sur des routes montagneuses avec de nombreux dénivelés. Monter ou descendre de telles routes sollicite fortement les freins, la transmission et le moteur (en rétrogradant). Les virages serrés des routes en lacets usent aussi les pneus.
Même les camions roulant en plaine, sur de longues distances et sans arrêts fréquents peuvent connaître une usure des freins s’ils transportent constamment des charges proches ou au-dessus de la limite légale, avertit Hickok.
Repousser les limites
David M. Broadwater Jr., gestionnaire des services de gestion de parc chez Holman, confirme que l’usure excessive provient souvent d’une surcharge ou d’un mauvais usage du véhicule.
« Les parcs ont souvent des camions légers qu’ils surchargent parce qu’ils ne veulent pas passer au gabarit supérieur », explique-t-il. « Il en va de même pour les camions de poids moyen. Certains sont surchargés ou mal utilisés, car l’entreprise ne peut pas se permettre de passer à la catégorie supérieure, même si ce serait nécessaire. »
Selon lui, ces décisions tiennent parfois au fait que la personne responsable du parc n’est pas un véritable gestionnaire de parc.
« Dans certains cas, la personne qui gère le parc vient plutôt du service des achats, de la comptabilité ou des RH. Les gestionnaires de parc aguerris qui connaissent bien les véhicules, les usages et la réglementation se font rares. »
Parfois, la gestion du parc n’est qu’un volet secondaire des responsabilités du gestionnaire. Ce manque de spécialisation est aggravé par une méconnaissance de l’utilisation réelle des véhicules : les responsables qui les commandent croient qu’ils seront utilisés d’une certaine façon, alors qu’en réalité, les conducteurs les sollicitent bien plus.
Autre enjeu : le budget. Les gestionnaires de parc peuvent faire des choix uniquement basés sur les coûts d’acquisition, en omettant d’évaluer les conséquences à long terme. « Pour respecter le budget, ils font des compromis sur les spécifications, ce qui nuit à la performance globale sur le terrain », ajoute Broadwater. « Ils ne tiennent pas compte du coût total d’exploitation à la fin du cycle de vie. »
Choisir le bon fournisseur
Pour bien entretenir les camions de poids moyen, Broadwater insiste sur l’importance de collaborer avec un atelier compétent. « Il faut s’associer à un bon fournisseur », explique-t-il. « C’est crucial, car selon où vous tracez la frontière entre les véhicules légers et moyens, vous pourriez apporter un F-450 (Ford) dans un atelier pour véhicules légers. Ils sauront peut-être changer l’huile et les freins, mais ont-ils les compétences pour détecter une usure prématurée ou d’autres problèmes lors d’un entretien préventif ? Probablement pas. »
Il est essentiel de travailler avec un atelier qui connaît bien les véhicules de poids moyen. « L’atelier est-il assez grand pour accueillir votre véhicule en le conduisant à l’intérieur? Ont-ils un pont élévateur adapté ? Ou bien font-ils l’entretien dehors, à plat ventre, allongés sous le véhicule sans pouvoir inspecter le dessous comme il faut ? »
Cette exigence vaut aussi pour l’aménagement des véhicules. Broadwater se souvient d’un client dont les composants de suspension s’usaient prématurément. Son équipe a découvert que l’aménageur n’avait pas fait son travail correctement.
« Le camion n’était pas de niveau », explique-t-il. « La grue, la boîte à outils et le compresseur d’air étaient tous installés du même côté. Résultat : cette partie du véhicule consommait les freins, les rotules lâchaient, les lames de ressorts se fissuraient… c’était un vrai gâchis. Voilà ce qui arrive quand on confie l’aménagement du châssis à un ami, au lieu de faire appel à un professionnel reconnu qui connaît les véhicules de poids moyen. On en a pour son argent. »