Planification, analyse et structure : les clés d’une transition électrique réussie

Le sujet est de plus en plus d’actualité au sein de la communauté des gestionnaires de flottes. Moins d’entretien, une image verte, des économies potentielles à long terme : les avantages des véhicules électriques ne manquent pas. Pourtant, sur le terrain, nombreux sont ceux qui hésitent à faire le saut.
Au cœur du débat, de multiples défis, mais surtout, de l’incompréhension, soutient Daniel Breton. La réussite de cette transition énergétique inévitable repose sur une démarche structurée, des données concrètes, de la formation, et surtout, une volonté claire de faire les choses autrement, selon le président-directeur général de Mobilité Électrique Canada (MEC).
« Il faut commencer par bien connaître son parc », insiste M. Breton. Il souligne que beaucoup trop de gestionnaires ne prennent pas le temps d’inventorier les spécificités de leur flotte actuelle.
Avant même de parler d’achat ou de recharge, une analyse rigoureuse des données factuelles s’impose. Combien de kilomètres les véhicules roulent-ils par semaine ? Par année ? Quels trajets font-ils ? Qu’est-ce qu’ils transportent ? Quelle est leur consommation réelle ? Ces réponses permettent de dresser un portrait clair et contribuent à une prise de décision éclairée.
Faire ses devoirs
Faire l’exercice du coût total de propriété (CTP) des véhicules à essence et le comparer à celui des véhicules propulsés aux électrons s’avère essentiel. « Dans la grande majorité des cas, ça coûte moins cher de passer à l’électrique. »
Mais pour arriver à cette conclusion, encore faut-il faire ses devoirs. Un investissement en temps, concède M. Breton, mais « c’est un investissement qui rapporte. Si tu ne fais pas cet exercice-là, c’est que tu es dans le déni. La job d’un bon gestionnaire de flotte, c’est de trouver des moyens d’être efficace et de sauver des coûts. »
Il importe ensuite de vérifier la capacité électrique du ou des bâtiments pour savoir ce qu’il est possible de déployer comme infrastructure de recharge. Ce travail inclut la planification de bornes de niveau 2 ou 3 et, au besoin, l’ajout de systèmes intelligents pour gérer la puissance disponible. Pour avoir l’heure juste, M. Breton recommande de faire appel à des entreprises spécialisées dans le secteur des flottes.
Une fois ces étapes franchies, on peut alors songer à faire le saut. Mais pas avant.
Au-delà de la logistique, il faut bien encadrer l’humain qui sera aux commandes de ces bolides électriques, pour assurer une transition fluide et efficace. M. Breton rapporte le cas de deux employés croisés à une borne de recharge avec leur camion Chevrolet BrightDrop. Un changement de trajet de dernière minute a eu raison de son autonomie, les forçant à se ravitailler avant leur retour à leur camp de base. Mais une fois sur place, « les conducteurs n’avaient aucune idée du fonctionnement de la borne. Zéro. Je les ai aidés et leur ai montré comment charger leur véhicule. »
L’exemple n’est pas isolé. « La plupart des gestionnaires de flotte et des concessionnaires, n’expliquent pas ou n’expliquent pas correctement comment gérer la recharge publique. » Une erreur coûteuse, facilement évitable. « Il est indispensable d’éduquer les employés pour qu’ils sachent comment se servir de leur véhicule électrique afin de prévenir les mauvaises surprises », et du même coup, rassurer les usagers.
Depuis 15 ans, MEC propose une formation spécifique à la gestion et à l’utilisation de véhicules électriques (VE). Le programme, mis à jour au fil des ans, est offert dans les deux langues et accessible partout au pays. L’organisme propose aussi des services d’accompagnement et de conseil pour aider les villes et les compagnies dans leur démarche.
S’informer pour mieux planifier
Si les incitatifs gouvernementaux jouent un rôle prépondérant dans les décisions des gestionnaires, M. Breton rappelle que les entreprises peuvent profiter d’une déduction fiscale fédérale à l’achat d’un véhicule électrique. Malgré ses nombreuses interventions pour la faire connaître depuis sa mise en service il y a six ans, le constat demeure accablant. « À ce jour, 95 % des gens n’ont aucune idée de ce dont je parle. Je trouve cela sidérant qu’ils ne soient pas plus informés que ça. »
Même si le Québec octroie toujours un rabais à l’achat de 4 000 $, la subvention fédérale, elle, continue à se faire désirer. Le gouvernement a annoncé son retour sans toutefois dévoiler de montant ou de date de début. « Tant qu’il n’aura pas donné de détails sur la reprise de son incitatif, plusieurs gestionnaires vont repousser leur décision », constate M. Breton. Il anticipe cependant une relance des ventes dès que les modalités seront enfin publiées.
La transition vers l’électrique ne s’improvise pas. Elle se planifie, s’analyse et se structure. Pour Daniel Breton, il ne s’agit pas d’un virage idéologique, mais d’un choix rationnel, appuyé par les bons outils et une approche méthodique. Il revient maintenant aux gestionnaires maintenant de passer de l’intention à l’action.